Bette Davis qui a été élue actrice de légende par l’Institut américain du film s’est imposée grâce à son incomparable talent, sa ténacité et sa forte personnalité qui transparaissent inévitablement à l’écran.

Sa carrière s’étend sur une soixantaine d’années et elle participera à plus de cent films. L’on comprend aisément qu’elle ait hérité des surnoms fort évocateurs de « Reine d’Hollywood » ou encore « Première Dame du cinéma américain ».

En soixante ans et cent un films, Bette Davis s’est donnée superbement en spectacle.

Elle a comploté, elle a fumé, elle a séduit, elle a souffert, elle s’est sacrifiée, elle a lancé des répliques mémorables : Bette Davis a tout dit.
Orgueilleuse et volontaire, elle a conquis le sommet, luttant contre les studios, ses maris et ses partenaires. Elle a incarné la femme émancipée des années 30 et à l’âge d’or des films sentimentaux, elle a apporté de l’esprit à un genre larmoyant. Bette Davis est un monstre de contradictions : égocentrique sans vanité, extravagante et sévère à la fois. A l’écran, chacun de ses actes est décidé, réfléchi mais sa vie est pleine d’ambivalence. Elle a un caractère paradoxal : elle a soif de rencontres mais privilégie sa carrière. Elle désire des hommes forts, autoritaires mais se rebelle contre eux bec et ongles. Elle veut un mari qui la domine, pourtant elle ne peut respecter trois de ses quatre maris…

Bette naît Ruth Elisabeth Davis le 5 avril 1908 à Lowell (Massachusetts). Bette recherche l’attention et c’est avec la danse qu’elle découvre les projecteurs. En 1928, la jeune femme fait ses débuts dans une troupe dirigée par George Cukor dont elle est renvoyée deux mois plus tard. Qu’importe, elle joue à Broadway l’année suivante dans Broken Dishes.

Bette Davis

Bette Davis

Des débuts timides au cinéma.

En 1930, elle est remarquée par les studios Universal. A 22 ans, elle tourne son premier film The Bad Sister (1931). Les gens du studio l’appellent avec mépris « le petit roitelet ». Après cinq films négligeables, son contrat n’est pas renouvelé mais George Arliss, ancien professeur de Bette et star de la Warner, lui offre une seconde chance. Il la réclame à ses côtés dans The Man Who Played God. Jack Warner est passé maître dans les productions en série.
Ce n’est qu’après que Bette ait tourné Of Human Bondage (L’Emprise, 1934) pour la RKO que Warner se rend compte de son potentiel. Jack Warner dira :  » Ils lui ont enfin trouvé un registre ! »
Son image de dure est renforcée dans Dangerous (L’Intruse, 1935). Le film lui vaut son premier Oscar.

Malgré l’Oscar, la Warner la cantonne à des films mineurs. Indigné par ses exigences, le studio la suspend et lui fait un procès, elle perd et doit acquitter ses obligations.
Bette a perdu mais la Warner a saisi le message et sous l’influence du producteur Hal Wallis, achète des scénarii forts pour la star montante : The Petrified Forest (La Forêt Pétrifiée, 1936) ou The Man who came to Dinner (L’invité de Madame, 1942).

Depuis le lancement du projet de Gone with the wind (Autant en emporte le vent, 1939), la Warner désire rivaliser avec sa propre épopée sudiste.
Elle acquière Jezebel (l’Insoumise, 1938) avec Bette dans le rôle principal. Commence alors la meilleure période de la carrière de Bette. Elle abandonne son maniérisme et apprend la valeur du silence et de la simplicité. En 1939, à l’âge de 30 ans, Bette remporte son second Oscar avec Jezebel. Les films se multiplient alors. Bette est la reine incontestée de la Warner. Elle impose ses réalisateurs et les mène à la baguette.

Guerre et productions personnelles

D’un point de vue personnel, elle cumulera les aventures vaines tout au long de sa vie, dominant le sexe masculin.

S’engageant dans l’effort de guerre en 1942, Bette fonde avec John Garfield, le Hollywood Canteen et enrôlent les gens de cinéma afin de divertir les troupes. Bette chante pour la cause.

Après avoir bataillé avec la Warner pour des projets de qualité, on l’autorise enfin à produire ses propres films. Un contrat de cinq ans l’engagera à produire et tourner quatorze films, dont cinq pour sa propre compagnie mais Bette ne profite pas de l’occasion. Elle ne produit qu’un seul film, le mélodrame A Stolen Life (La Voleuse, 1946) et dissout sa compagnie quelques années plus tard pour retourner auprès de Warner se plaindre de ses rôles…

Après la guerre, le goût du public a changé. Bette connaît trois échecs successifs. L’heure n’est plus au modèle de la femme indépendante. Beyond the Forest (La Garce, 1949) dirigé par King Vidor est son dernier film pour la Warner. Trop âgée dans le rôle de la femme fatale adultère, elle frise l’auto parodie.
En 1949, Bette demande à être libérée de son contrat. Jack Warner calcule froidement son poids au box-office et la laisse partir sans discuter. Elle aura passé deux décennies à arpenter les escaliers du studio…

Un an après son départ, All about Eve (Eve, 1950) signera sa revanche artistique. Ce sera le film le plus nominé de l’histoire d’Hollywood avec quatorze nominations et six Oscars. Bien que le rôle de Margo Channing n’ait pas été écrit pour Bette, il est lié à jamais à sa légende.

Dans les années 50, les premiers rôles laissent place à des rôles secondaires et à la publicité. En 1961, elle tourne à nouveau pour la Warner et triomphe dans What Ever Happened to Baby Jane (Qu’est-il arrivé à Baby Jane ?, 1962).

Portrait de Bette Davis par Alistair Morrison

Portrait de Bette Davis par Alistair Morrison

Sa carrière ne cessera jamais. . . Rien n’aura su venir à bout de sa combativité.

Qu’il s’agisse de chefs-d’œuvre ou de films de qualité médiocre, elle s’implique dans ses rôles comme si sa vie en dépendait. Et c’est peut-être le cas. Âgée de 70 ans, elle reste sur le plateau avec les techniciens à savourer l’ambiance de son lieu de travail, son vrai foyer. Elle n’envisage jamais la retraite. L’orgueilleuse Yankee ignore le repos, la diva ne peut quitter le feu des projecteurs…
En 1977, c’est la première femme récompensée pour l’ensemble de sa carrière.
A 75 ans, elle tombe gravement malade et publie, avec l’aide de son assistante, un livre sur sa guérison.
Fragile mais infatigable, Bette tourne encore.
Elle meurt à Paris le 6 octobre 1989. Elle a 81 ans. Sur sa tombe est écrit : »She did it the hard way » (Elle a vécu sans concessions).

“L’expérience m’a enseigné, écrivait Bette, que les rapports humains ne sont pas durablement gratifiants. Seul le travail apporte une véritable satisfaction.”

Elle n’abandonnera jamais son meilleur rôle : celui de sa vie…